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Gilets jaunes : tous responsables
8 DECEMBRE 2018 : TOUS RESPONSABLES
Nous sommes tous, quel que soit notre niveau social, indignés par le mal logement, la malnutrition la pauvreté, qui règnent à nos portes.
Nous affrontons tous directement des difficultés liées à notre pouvoir d’achat, le chômage, la déqualification, l’incertitude de l’avenir.
Et nous cherchons tous dans un parti politique, un syndicat, un mouvement ou une action une solution ou même un début d’espoir.
Comment la France en est-elle arrivée là ?
Comment le monde occidental en est-il arrivé là ?
Qu’avons-nous fait de nos rêves ?
Depuis des décennies, avec des moments marquants comme la création du secours catholique, populaire ou des restos du cœur, nous savons que la pauvreté frappe à notre porte.
Qu’avons-nous fait (qu’ai-je fait) ?
Nous donnons quelques sommes d’argent aux associations qui sont les plus proches de nous, tout en aggravant par nos comportements la situation déjà inacceptable des plus faibles d’entre nous.
Nous les laissons ainsi végéter dans une position de dépendance face à la bonne action des organisations qu’on peut qualifier « de secours ».
Alors que faisons-nous :
Nous réclamons de notre gouvernement qu’il règle nos problèmes.
Ils ont été élus pour ça.
Comme nous tous, j’ai voté en mon âme et conscience pour le parti qui pour moi, au moment de mon choix, semblait le plus apte à dépasser la crise économique, voire à rééquilibrer la société.
Le fait que visiblement, notre gouvernement actuel n’a pas réussi à résoudre les problèmes ne m’incite pas à marcher sur Paris pour aller à l’Elysée.
Oui, je suis du peuple (j’ai passé une partie de mon enfance dans une cité ouvrière qui a été depuis abattue pour vétusté).
Oui, le pouvoir reste toujours finalement au peuple, qui a montré par le passé qu’il pouvait l’utiliser pour renverser les gouvernements en place.
Oui, la situation est inacceptable, et le dire ne suffit jamais à la résoudre.
Mais non, je ne marcherai pas sur l’Elysée, ni n’irai manifester à Paris alors que des factions violentes pourraient se glisser dans les rangs dont je ferais partie.
La démocratie est par définition l’organisation de la société au travers des votes de représentants élus.
L’incertitude du dernier scrutin présidentiel et la répartition des voix entre les partis en présence montrent qu’aucune proposition politique n’apparaissait comme évidente ou suffisante pour faire régresser les difficultés, stabiliser une situation économique faible, et consolider quelques nouveaux acquis.
Démolir l’Elysée, casser du mobilier urbain, s’attaquer aux forces de l’ordre ne résoudra pas ce néant politique.
Il ne fera qu’aggraver le sentiment de crise et d’insécurité.
Utiliser la violence pour forcer la société tout entière à prendre le chemin que l’on estime le meilleur pour elle est un processus antidémocratique, insurrectionnel voire relevant d’un désir de dictature (des pauvres, de la droite, de la gauche, de la rue, du peuple, mais une dictature), désir forcément destructeur et improductif.
Alors que faire ?
Au moins, on sait maintenant que tout ce que nous, en tant que braves gens bénévoles ou donateurs avons fait, est bien mais nettement insuffisant (sauf à rassurer nos bonnes consciences), car les problèmes de fond restent :
- Donner une prime aux pauvres : c’est un puits sans fond, puisque cette prime sera à reconduire de jours en jours et d’années en années. Cela ne permet pas à nos concitoyens de retrouver une place dans la société qui ne s’acquiert que par le travail. Cela les maintient juste dans la dépendance tout en les privant d’une certaine liberté donnée par le fait de pouvoir subvenir à ses propres besoins selon ses propres choix.
- Mettre en place des Etats généraux a le mérite de rétablir le dialogue et de faire un bilan de la détresse de nos concitoyens, mais cela n’apportera rien à qui que ce soit s’ils ne débouchent pas sur des propositions de solutions.
Mettre en place des assemblées citoyennes n’est efficace que si dans ces assemblées, les personnes présentes peuvent discuter de leur situation personnelle mais aussi des situations qu’elles pourraient avoir à rencontrer. Or personne n’est à la fois politique, économiste, patron, travailleur, handicapé, vieux et soutien de famille. Ce système aux dérives bien connues des enseignants pratiquant les conseils de classe ne peut fonctionner sans des principes premiers à ne jamais transgresser (respect des personnes, droits élémentaires ...) et une organisation solide et respectée. Il n’apporte pas de solutions en lui-même, juste un complément ou une variante (et non une alternative) utile à la démocratie.
Parallèlement, nous participons largement à cette société de consommation qui nous tue, au sens propre (par la pollution), comme au sens figuré (économiquement et socialement).
Visiblement, le monde est déjà à peu près mort sur le plan politique.
Nous achetons sur des plates-formes étrangères des produits fabriqués à l’étranger, distribués en France sans que les bénéfices produits par ces ventes participent à l’effort collectif de notre économie qui paie.
o Nous n’effectuons aucune sélection sur ces marchandises :
o Elles polluent parce qu’elles proviennent de pays très lointains, ajoutant de la pollution grise à la pollution déjà générée par l’industrialisation générale
o Elles ne sont pas bio, et nous affermissons à travers ses achats le cercle vicieux de la pollution. Ainsi, le transport de marchandises d’un pays à l’autre augmente la pollution grise, quand chaque pays devrait subvenir à ses besoins de base, profitant des emplois ainsi créés localement.
o Certains pays produisent en monoculture, au profit d’un gain qui leur permet de survivre à la dépendance provoquée dans d’autres domaines. Nous ne favorisons pas l’entrée de ces pays vendeurs de ces produits dans un monde économiquement viable, puisqu’ils s’ajoutent au panel des pays en déséquilibre interne.
o Le fait que certains pays dominent dans la vente de certaines marchandises tue l’industrialisation ou le commerce qui pourrait naître de la production et la distribution de ces marchandises dans chaque pays.
Achetons français, de proximité, local et non exotique. Cultivons notre créativité pour redonner vie à nos produits, tellement traditionnels qu’ils en sont boudés car trop « populeux » pour notre image de français « arrivés » (pour ne pas dire parvenus).
Nous nous sentons responsables, mais inutiles.
Au lieu d’alimenter l’idée que la société peut se vider continuellement dans des œuvres humanitaires toujours débordées, construisons le monde que nous voulons : rien ne nous en empêche, et certainement pas la politique.
Nous voulons de l’écologie :
- Construisons des organisations (des banques, des services, des groupements) venant en aide aux agriculteurs qui veulent convertir leurs exploitations en bio, ou changer de production (par exemple pour produire des énergies vertes).
- Aidons-les à s’intégrer en évitant le piège de la monoculture qui tue la flore et la faune sauvage.
- Rétablissons l’entraide agricole et les fêtes qui dominaient autrefois le monde agricole : donnons leur place aux fêtes des vendanges, des citrouilles, des pommes, des fraises … selon les localités.
- Aidons à ce que la transformation et la commercialisation de ces produits rapportent à ceux qui font le travail, réduisons les intermédiaires (non pas qu’ils ne travaillent pas, mais parce que le déplacement de leurs efforts vers d’autres domaines sera sans doute bien plus utile).
- Arrêtons de marcher pour le climat : multiplions les sources d’énergies vertes et renouvelables, investissons notre argent humanitaire dedans, tout en veillant à ce que cette voix développe des emplois, des habitudes, de la maîtrise et de la conscience de l’environnement. (Et arrêtons de bloquer la construction des éoliennes parce qu’elles déparent le paysage. Cet argument, s’il est unique, n’est pas valable. D’autres le sont bien plus. Discutons-en).
- Désenclavons les territoires. Quoi, on nous dit que seules les villes sont viables économiquement ! Pourquoi ne pas produire en campagne. Une société solide, ce n’est pas celle qui s’écroulera dès que ses grandes villes seront en panne de carburant ou de productivité, mais celle qui est constituée d’une multitude de cellules indépendantes qui tiendront le tissu économique, social et humain en cas de problème.
Nous consommons - pour ceux qui en ont les moyens selon notre bon vouloir - et nous estimons avoir droit, en récompense de notre travail, à des loisirs : vacances en hôtels ou à l’étranger, restaurants, weekends de bien être, sorties …
Nous estimons également avoir le droit également d’obtenir des services (santé, police, protection de l’Etat par l’armée, éducation …), et nous estimons aussi que ces services pèsent trop sur l’impôt. L’Etat doit donc économiser sur ses frais.
Certes, il y a sans aucun doute une déperdition administrative galopante, que ce soit dans le public des services, ou le privé de la production.
Mais réduire les services publics sur lesquels reposent la démocratie avant même la République ne va provoquer que le transfert des services publics au privé et donc la déréglementation des prix de ces services.
Exemple : Vous ne voulez plus payer pour la santé.
Soit. Que les services de santé privés fleurissent, dans lesquels les personnels, même de bonne volonté, ne pourront faire plus que le public dans les mêmes conditions d’exploitation.
La guerre n’est donc pas au public contre le privé, mais à l’utile contre l’inutile, à l’efficace contre le déplacé, au rationnel contre le superflu. Arrêtons de construire des bâtiments administratifs permettant la gestion des hôpitaux quand on manque de lits aux urgences.
Autre exemple :
Vous avez cru que privatiser la SNCF allait permettre la baisse des prix des transports en fractionnant les services et en les mettant en concurrence.
Faux : cette voix de la fragmentation des services existe à l’intérieur de la SNCF depuis les années 80.
Un service SNCF n’ose plus faire appel à un autre service SNCF compétent pourtant relevant de la même société car chacun d’entre eux est soumis à des impératifs de productivité. Faire appel aux autres services entraîne la diminution de la productivité d’un service au bénéfice d’un autre, et donc impacte ses résultats de fin d’année. Donc on ne résout le problème que quand il devient criant. On essaie de parvenir tant bien que mal aux objectifs internes imposés d’économie alors même que le fonctionnement global en est affecté. Mais chaque responsable obéit aux ordres d’une hiérarchie compartimentée.
Nous avons besoin de services : choisir nos loisirs et délaisser nos services est un contrat de dupe : nous devenons tous vieux, nous risquons tous un accident, ou d’être malade un jour …
Qu’est-ce que chacun d’entre nous privilégie dans sa vie : sa santé, son alimentation, l’éducation de ses enfants, sa sécurité, son revenu (s'il en a), ses loisirs, ses convictions, sa lutte (contre qui ?) …
Certaines personnes revendiquent aujourd’hui de ne pouvoir tenir le train de vie qu’elles avaient il y a quelques années, d’autres se plaignent de devoir réduire le nombre de leurs croisières ou du montant des cadeaux (généreux) qu’ils font à leurs enfants lors des fêtes, de devoir fermer plusieurs de leurs agences ou de leurs magasins (!) …
Peut-être ont-elles mal estimé le potentiel commercial ou économique qu’elles ont mis en place.
Certains chefs d’entreprise aguerris accompagnent déjà ces entrepreneurs qui se sont pris les pieds dans le tapis, ou ceux qui veulent se lancer dans l'aventure tout en éliminant les risques élémentaires liés à ces véritables aventures économiques.
Mais peut-être la volonté d’aller trop vite et trop loin a-t-elle démontré ses limites.
Quid de la slow économie ?
Notre jeunesse est en détresse : sommes-nous si pauvres en esprit que ça ?
Nos jeunes sont dans la rue car ils estiment, sur le discours de leurs aînés, qu’ils n’auront pas d’avenir s’ils ne vont pas en faculté.
Sommes-nous si doctrinaires que ça ?
La fracture sociale est donc déjà marquée dès l’école : vous ne réussirez que si vous allez en faculté, pour obtenir un bon job bien payé, qui vous permettra de diriger sur des informations techniques, commerciales ou humaines le monde que vous dominerez.
Or le monde est bien partagé : on peut juger de façon très caricaturale qu’il a besoin d’un tiers de têtes pensantes, d’un tiers de production, et d’un tiers de services de toutes sortes.
80 % de classe d’âge à bac plus 5, Quelle horreur !
Nous voulons que ça change : reconnaissons à nos pairs la place qui leur revient.
Redonnons la place qui leur revient aux apprentissages professionnels (courts pour ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas suivre un cycle long et ennuyeux), avec la reconnaissance professionnelle qui va avec et une mobilité qui leur permette de faire reconnaître simplement leurs acquis (réservez simplement une côte part des recrutements d’ingénieurs à ceux issus de la formation continue ou du terrain, par exemple).
Cela aurait le mérite de ne plus voir dans pratiquement toutes les sociétés des dirigeants en rupture complète avec leurs employés, réfléchissant par chiffre ou statistiques dans des domaines ou de toute façon, seule la réalité de base finira par l’emporter.
Ceux qui vont aller manifester ont raison de crier leur ras le bol.
Accepter de le faire alors que l’on sait que l’on va abriter des mouvements violents, c’est refuser de transformer l’élan qui submerge la France : personne ne cautionne la violence, la casse, les blessés, les ’affrontements. La marée de soutien aux gilets jaunes montrent l'empathie de la France envers cette souffrance qu'elle ne sait pas soulager.
Serrons-nous les coudes et comprenons que la solution est dans la prise de conscience de la reconstruction interne de notre pays, économique et humaine.
Soyons fidèle aux traditions françaises ; tentons de construire.
Vous voulez donner :
- Donnez utile : construisez écologique, économique, humain et par temporaire, ponctuel, asservissant.
- Construisez dans la proximité en respectant l’équilibre de la société
- Refusez les faux profits faciles qui détruisent à long terme ce qui semble acquis sur le moment
- Discutez, échangez, partagez.
- Soyez sobres, laissez dès le départ aux autres la place à laquelle vous substituerez votre condescendante bonté de donateur humanitaire.
Vous pensez que les autres, la politique, le président, le patron est responsable.
Vous avez raison. Combattez les conceptions et les actions des responsables que vous connaissez.
Personnellement, je vais commencer dès aujourd’hui …
Par celle que je vois tous les matins dans mon miroir !
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