• Je me souviens de ma jeunesse.

    Papa facteur, maman nourrice agréée.

    Pour nous, les études ont toujours été d’actualité, à condition qu’elles ne soient pas trop longues.

    Il faut dire que le grand-père nous a souvent répété avec fierté que dans sa famille, filles et garçons ont toujours su lire et écrire (il ne pensait pas si bien dire !).

     

    Aussi, comme nombre de mes contemporains, ai-je été invitée à passer les concours d’entrée dans la fonction publique.

    Passé en 1974 au niveau de la seconde, la concrétisation de mon engagement dans l’éducation nationale n’a été effectif qu’en 1976, après le BAC passé en lycée.

    Deux années de formation en école normale (elle était encore nommée ainsi), avec quelques rares stages (ça n’a pas changé aujourd’hui), puis le terrain.

     

    Les salaires proposés alors étaient juste au-dessus du SMIC, pour des horaires qui tournaient comme aujourd’hui autour de 50 heures par semaine : une étude indépendante récente montre que les enseignants travaillent environ 1730 heures  par an (en 36 semaines), n’étant pas comptées celles qu’ils effectuent pendant leurs (nombreuses) vacances pour leur remise à niveau personnelle, qui reste à leur discrétion, bien sûr.

    Par comparaison, 35 h / semaine X 47 semaines de travail = 1645 heures par an pour un travailleur du privé.

    Cette différence entre heures sur papier et heures réellement effectuées vient du fait que les enseignants sont payés à la « prestation », comme les artistes : 18, 24, ou 32 heures par semaine réparties selon leurs différentes fonctions, les temps de préparation n’étant pas inclus dans le temps décompté.  

    Le salaire de départ, bas au regard du niveau des enseignants et des horaires réels effectués était alors justifié par le fait que les études en école normale étaient gratuites.

    Il semblait logique alors que l’entrée salariale dans la fonction se fasse de façon « modeste ».

    L’engagement dans la fonction se faisait pour un minimum de dix ans, pendant lesquels nous étions sensés « remercier » l’état d’avoir bien voulu nous former à notre métier.

    Le contrat signé débutait à nos 18 ans, même si nous avions été en formation ou sur le terrain avant. Ainsi, aucun enseignant ne peut justifier d’avoir travaillé avant ces 18 ans, même si ça a été le cas.

     

    Le salaire augmentait ensuite par palier, selon un système mêlant principalement l’ancienneté à une petite part de mérite.

    Il devenait comparable à celui d’un travailleur du privé de qualification équivalente dans les 10 dernières années de carrière, y étant inclus une partie versée par primes ou indemnités. La retraite est calculée sur une base de taux plein au bout de 42 annuités sur une base ne prenant en compte ni primes, ni indemnités.

     

    Quant aux avantages sociaux :

    -        - Un an de bonification pour enfant au lieu de deux ans dans le privé

    -       -  Des cotisations retraites prélevées au même taux que celles du privé mais versées par primes (indemnités de fonction ! ) (mis à part quelques rares euros)  intégralement à la caisse principale de retraite : donc une retraite versée par cette caisse sur la base de 75 % maximum du salaire de base (sans primes …) des derniers mois d’activité (les seuls payés de façon décentes pour la fonction diminués des fameuses primes ou indemnités de fonction) avec une complémentaire totalement symbolique (15 euros par trimestre tout au plus).

    Ce sont donc les fonctionnaires qui, par leurs versements et cotisations ont soutenu le régime général des retraites, en y versant la totalité de leurs cotisations, sans en obtenir le pactole décrit généralement par la vindicte publique.

    Un enseignant à la retraite touche environ 65 % du salaire de base de ses derniers mois d’activité de la part de la caisse de retraite, et non de son salaire réel, sa complémentaire étant symbolique ou inexistante.

     

    Et la complémentaire retraite :

    -        L’état a créé des lois la rendant obligatoire, mais devant l’obstacle que constitue le fait que le salaire des enseignants est déjà très bas au regard de leur qualification et du volume des horaires fournis (les concours sont de moins en moins fréquentés, et il y a même parfois pénurie de candidats), il a créé une complémentaire symbolique pour les enseignants, leur proposant de cotiser à titre privé auprès des complémentaires proposées par les banques.

     

    L’ascenseur social de l’époque consistait donc :

    -        - Soit à monter en grade au sein de son entreprise, à condition qu’il y ait une part des postes réservée à une promotion sociale interne, et que les DRH ne se limite pas à un engagement sur des diplômes mais reconnaissent la part de formation née de l’expérience

    -        - Soit à entrer dans la fonction en limitant ses ambitions, car à moins d’être à un poste très élevé, un fonctionnaire ne fait jamais fortune.  

     

    Il est tout à fait dommageable qu’aujourd’hui, le monde de l’éducation et le monde du travail ne coopère pas :

    -       -  Pour que les jeunes puissent être engagés jeunes dans un métier, avec possibilité de formation et de promotion au sein ou entre entreprises.

    -        - Que l’entrée dans les facultés ou grandes écoles ne se fassent pas par concours, ceux qui échoueraient ayant sans doute besoin d’avoir plus de maturité ou d’expérience pour pouvoir prétendre les repasser

    -        - Que les postes à pourvoir dans chaque entreprise, y compris dans la fonction publique, ne soient pas répartis à égalité entre postulants venant du monde de la faculté, de l'université … et postulants provenant par expérience, formation et promotion du monde du travail.

     

    Je milite donc à titre privé pour que tous les travailleurs aient les mêmes droits au regard des mêmes obligations, mais soyons conscients que les efforts consentis par certaines catégories de fonctionnaires (enseignants, infirmières, policiers, militaires, …) ne pourront pas perdurer dans les conditions souvent indignes qui leur sont faites.

    Contrairement à ce que pense les salariés du privé, les fonctionnaires seront gagnants à être payés comme eux, au même niveau de rémunération, avec des cotisations sociales et des obligations équivalentes.

     

    En fait, souvent ces métiers du public reposent sur des passions, comme aussi les métiers de l’artisanat.

    Il n’y a donc pas lieu d’opposer les uns aux autres, mais de rassembler.


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